Ah! Oui! Merci!
Y aurait-il, en plus de la médit-action, un exercice philocalique et poétique que nous pourrions pratiquer ; à la fois pratique d’attention et remémoration de l’Etre-Source ?
Trois mots ou trois lettres suffisent à le résumer : Ah ! Oui ! Merci !
Ah ! C’est l’attention, l’étonnement devant tout ce qui est agréable ou désagréable,
non la prise mais la surprise, non l’objet mais la présence :
Un instant, le souffle est suspendu, je vois ce que je vois.
Quelque chose plutôt que rien. Et parfois quelqu’un plutôt que quelque chose : l’existence a une densité minérale, un parfum végétal, une tête de chien, un visage d’homme.
On peut même pressentir au-delà de tous ces atomes, une onde de merveille.
Ah ! Sans jugement, sans qu’est-ce que c’est ? C’est ainsi.
Oui ! Le sommet de la philosophie, c’est l’acquiescement à ce qui est, le grand oui à la Vie, qu’elle nous enivre ou qu’elle nous déchire. C’est aussi une des définitions de la vérité, l’adéquation de notre intelligence à ce qui est.
Si à l’intelligence se joint l’adéquation du coeur, alors c’est la foi qui est adhérence (pistis en grec, emin en hébreu), non dualité avec ce qui est.
Merci ! Acquiescement, adéquation, adhérence...
L’adhérence à ce grand oui à ce qui est, peut devenir un grand merci.
C’est là un pas de plus qui nous fait passer de la science et de la philosophie à la philocalie qui est gratitude et grâce d’exister plus que fatalité ou nécessité d’exister.
A la grandeur et à la noblesse de l’acquiescement
se joint l’humilité de la joie et de la reconnaissance.
Ah ! Oui ! Merci ! Trois paroles salvatrices, gouttes de sens, déposées dans le mouvement présent de notre conscience. Ils peuvent se résumer en un seul « A Ou M » qui est le son primordial d’où émergent toutes les formes et les matières.
C’est aussi le Nom qu’invoquait Yeshoua dans Sa Prière du Coeur, A’um en araméen voulant dire « Père » - abba en hébreu – Silence, Source de ma vie et de toute Vie...
« L’art du Saule » de Jean-Yves Leloup, éditions NY-Paris-Tokyo, p. 317-319